Salon du livre : day 2, jeudi 15 mars

Publié le par Miyu

Jeudi, jour de l'inauguration du salon. On m'avait donné rendez-vous à 16h, l'inauguration commençait à 17h. Bien naïvement, je pensais que cela durerait jusqu'à environ 21h... Ouais. Ou pas. En fait, le salon fermait pour l'occasion à 23h... C'est fou le temps dont les gens ont besoin pour jouer les mondains et manger aux buffets...

 

En fait, c'était assez drôle. Les invités de l'inauguration étaient pour la plus grande majorité des gens célèbres ou de la haute société. Alors pensez-vous, s'approcher des mangas, qui plus est des mangas traitant d'homosexualité ! Jamais ! On se contente de pincer les lèvres et de jeter aux éditeurs un regard méprisant, que ceux-ci pourraient tout aussi bien traduire par : "Vous vous rendez compte. Du manga au salon du livre, paradis de la culture d'élite et des Grands Ecrivains." Presque risible. 

 

Heureusement, je force un peu le trait. Il y avait d'autres éditeurs de mangas qui sont passés voir les directeurs de la maison d'édition, ainsi que des auteurs et des chroniqueurs. J'ai d'ailleurs eu l'honneur de rencontrer un jeune éditeur de chez Milady (le label de chez Bragelonne) ! Très sympathique ancien de chez Tonkam, il est venu parler à mes patrons de ses derniers projets, dont la création de son site de rencontre et d'actu pour geeks, Geek me more. Le concept était vraiment génial, et le dossier de presse donnait presque envie ! Un chroniqueur de mangas est également passé saluer les éditeurs. Ils ont passé quelques minutes à parler de la (mauvaise) organisation du salon, de l'édition de yuris (une histoire d'amour entre deux filles), et d'un article récemment publié dans le Figaro sur "le manga, une sous-lecture" ou quelque chose du genre.

 

Bien sûr. Un jour, il faudra qu'on explique à la haute société bien-pensante que faire lire Proust ou Hugo à un gamin de dix ans, aujourd'hui, ce n'est plus possible. Que dans le manga, il y a de tout, aussi des choses très belles et travaillées graphiquement. Alors oui, il y a aussi des trucs bateaux et pas forcément très intelligents pour les plus jeunes (ou même les plus grands d'ailleurs), il y en a qui présentent des scènes choquantes (sexuelles ou gores), mais... et alors ? il y a des livres pornos et il y a des livres gores, et franchement, ce n'est pas parce qu'on habite un hôtel particulier dans le 16ème qu'on ne regarde pas de films pornos. Oui, messieurs les élites, on sait que vous a-do-rez mépriser ceux qui n'apprécient pas la "bonne littérature" comme vous, que vous adorez cracher sur les politiques qui ne font rien pour la culture sans bouger le petit doigt vous-même. Mais y'a un moment, il faut arrêter. On ne peut pas à la fois déplorer que la lecture n'est plus en vogue chez les jeunes ET considérer comme illégitime les modalités de lecture qui leur sont accessibles. Surtout que franchement, le manga, ce n'est pas un genre, c'est une forme de livre, on trouve de tout dedans. D'excellents thrillers, des dessins à couper le souffle... Et ce n'est pas parce que Naruto, c'est du manga que le manga, c'est Naruto. Alors vous êtes bien gentils, mais à un moment, messieurs les journalistes du Figaro, il va falloir que vous arrêtiez de dominer le monde de votre mépris de bourgeois et que vous acceptiez que tout le monde a ses goûts de lecture.

 

Le vrai problème, ce n'est pas l'existence de genres "moins littérairement cotés" que d'autres, le problème, c'est que les gens ne diversifient plus leurs lectures. Et vous voulez un scoop ? Les responsables pour ce manque de diversité sont les mêmes que ceux qui la critiquent. A votre avis, qui sont les bien-pensants qui ont refusé de mettre le pavillon japonais à côté des mangas ? On ne veut pas mélanger les publics, on ne veut pas être mélangés aux cosplayers (ces gens sont vraiment trop bizarres, il y en a même qui sont travestis ! Franchement, être doué en couture et travaux manuels c'est passé de mode...) ni aux grands immatures qui raffolent de ces histoires pour gamins... Vous avez raison, il faut les cloîtrer dans leur manque de diversité culturelle et comme ça, enfin, on aura un bouc émissaire sur qui se défouler. De toute façon, c'est bien connu, la culture n'est pas faite pour bien des gens. De toute façon, culture, littérature, c'est la même chose (mais bien sûr !), et tant que ce n'est pas digne de Proust, ça n'est pas légitime...

 

Non mais sérieusement.

 

Enfin BREF.

 

Après ce court débat, on a vaguement attendu. Puis j'ai été libérée de mes obligations à 21h30, inutile de rester si c'est pour ne rien faire d'autre que rouler des posters... Au bout d'un moment le carton est déjà plein XD Mais bon, on aura quand même fait une vente dans la soirée (un homme de quarante ans, CSP aisée, a acheté du yaoi... comme quoi.)

 

En faisant un dernier tour avant de partir, je me suis rendue compte que les rassemblements de gens pendant l'inauguration se faisaient selon des paramètres très simples. Ils allaient sur les gros stands et surtout là où il y avait des banquets.

 

Voilà, la simplicité de la mondanité de l'élite culturelle française...

 

Je me suis rendue compte déjà ce soir là à quel point la semaine allait être physiquement éreintante. Mais ça promettait aussi d'être agréable si le public se diversifiait un peu. Mes patrons étaient vraiment adorables, passionnés et motivés... J'avais la sensation d'avoir parfaitement bien choisi mon stage !

 

Et la phrase de la journée, de mon ami LB, fils du directeur de la maison d'édition : " Ca va, tu t'embêtes pas trop ? Quelle idée de vouloir y aller le jeudi aussi..." Oui, bah comme ça, je saurai pour la prochaine fois !!

Publié dans La photo du mois

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